Chaque mois, découvrez une bonne pratique en entreprise. Ce mois-ci, découvrez l’économie circulaire.
Qu’est-ce que l’économie circulaire ?
“L’économie circulaire vise à changer de paradigme par rapport à l’économie dite linéaire, en limitant le gaspillage des ressources et l’impact environnemental, et en augmentant l’efficacité à tous les stades de l’économie des produits.”, définition de l’ADEME.
Mais d’abord, commençons par expliquer ce qu’est l’économie linéaire ?
L’économie linéaire est une économie globalement adoptée par toutes les entreprises des pays occidentaux, notamment depuis la révolution industrielle. Ce modèle consiste à extraire les ressources, fabriquer des produits ou des services, les consommer/utiliser avant de finir par les jeter (ce qui les transforme en déchets). De ce fonctionnement, deux enjeux évidents apparaissent :
- Qu’en est-il de la diminution des ressources ?
- Que faire de cette augmentation exponentielle des déchets ?
Évidemment, d’autres enjeux socio-environnementaux s’ajoutent en plus à ces derniers. Ainsi l’économie linéaire ne peut pas perdurer indéfiniment, car nous commençons à être confrontés aux limites de ce système.
Face à ce mur, une solution envisageable est le modèle de l’économie circulaire.
Concrètement, l’économie circulaire consiste à repenser nos manières de produire des biens et des services afin qu’ils soient durables en limitant :
- La consommation de ressources,
- Le gaspillage de ces ressources,
- La production de déchets.
Et surtout, en préservant le plus longtemps possible la valeur créée pour ainsi limiter le besoin de production. En d’autres termes, il s’agit d’augmenter l’intensité d’utilisation des ressources tout en diminuant les impacts négatifs sur l’environnement.
L’ADEME illustre l’économie circulaire à travers 3 domaines d’actions et 7 piliers :
- OFFRE des acteurs économiques : ce domaine d’action concerne directement des industries puisqu’il s’agit avant tout de RÉDUIRE la consommation des ressources.
- DEMANDE ET COMPORTEMENT des consommateurs : il s’agit de changer les comportements et les habitudes de consommation pour RÉUTILISER en favorisant des pratiques qui rallongent l’utilisation des ressources et en encourageant la mutualisation de ces dernières.
- GESTION DES DÉCHETS : pour permettre le développement de nouveaux acteurs du traitement des produits jetés capables de valoriser et RECYCLER les ressources en fin de vie.
Réduire, réutiliser et recycler sont des mots clés de l’économie circulaire.
Quels sont ses impacts ?
Les impacts positifs de l’économie circulaire sont multiples pour la planète, la société et les entreprises.
1- Pour prendre soin de la planète
Il existe 7 familles de ressources :
- Les minéraux (exemples : sable, pierre, calcaire, pierres précieuses…) ;
- Les minerais / métaux (exemples : fer, or, cuivre et autres terres rares) ;
- Les combustibles fossiles (exemples : pétrole, gaz, charbon) ;
- La biomasse (exemples : plantes, arbres, insectes …) ;
- L’eau ;
- L’air ;
- Le sol.
Les 4 premières étant regroupées sous le terme de matières.
Tout notre système de production repose sur ces 7 familles de ressources. Il n’y en a pas d’autres. La Terre étant un système fini, cela signifie que nos ressources le sont aussi. En consommant ces ressources comme nous le faisons actuellement, nous impactons de nombreux processus et cycles naturels. Les plus connus sont la modification du cycle de carbone avec pour conséquence le réchauffement climatique et la modification du cycle de l’eau qui engendre des sécheresses intenses sur tout le globe et des inondations de plus en plus destructrices.
Ce n’est pas tout, car c’est aussi l’équilibre de la biodiversité que nous impactons, entraînant des conséquences en cascades qui se répercutent sur l’Homme qui est interdépendant de cette biodiversité.
En sommes, la transformation de notre économie linéaire actuelle vers une économie circulaire impact favorablement planète par le simple fait de réduire.
Réduire l’extraction des ressources, réduire la production de biens, réduire la consommation d’énergie, réduire la production de déchets néfastes, réduire la pression sur les écosystèmes… tout cela en repensant la conception, la production, la consommation et la fin de vie de ces biens et services.
2- Pour prendre soin de la société
L’économie circulaire prend soin de la société de 3 manières.
La première, c’est en créant des emplois durables, locaux et beaucoup plus respectueux des travailleurs que ne le fait l’économie linéaire effrénée dans laquelle sont de nombreuses entreprises.
La seconde concerne le pouvoir d’achat. En augmentant la durée de vie des biens, nous réduisons la surconsommation de ces mêmes biens. De plus, l’économie circulaire encourage le partage et la mutualisation ce qui permet d’intensifier leur utilisation (exemples : en moyenne dans toute sa vie, une perceuse est utilisée 12 minutes, de même qu’une voiture passe plus de 92 % de son temps à l’arrêt). De ce fait, en optimisant l’utilisation des produits existants, on réduit le besoin de production et on redonne les moyens à la société d’améliorer son pourvoi d’achat et de consommer de manière respectueuse pour sa santé et son confort, tout comme pour celui de la planète en général.
Enfin, la conception des produits étant repensée pour être plus durable pour l’environnement, la société et l’économie, cela sous-entend de réduire voire de bannir les produits dangereux aussi pour la santé. Limiter l’usage du plastique (se dégradant en micro et nano-plastiques), limiter l’usage des produits chimiques dangereux dans les différents secteurs (métallurgie, agriculture, textile, produits ménagers…), limiter les extractions de ressources sur certains territoires dont les communautés locales dépendent (les forêts, les océans, les zones humides… pour en savoir plus : “Un nouveau droit pour la Terre” de Valérie Cabanes), etc…
Notre santé à tous (travailleurs, consommateurs et communautés) se portera bien mieux sans l’utilisation de ces produits polluants.
3- Pour prendre soin de son entreprise
L’économie circulaire questionne le modèle économique des entreprises et par conséquent leur durabilité. Le business as usual n’est pas durable et commence à se faire sentir dans certains secteurs, notamment dans le secteur du prêt à porter.
Ce type d’économie ouvre alors de nouvelles perspectives et notamment la création de nouveaux modèles d’affaires. Ce sont des modèles qui demandent parfois du temps de conception, de test et d’implémentation. C’est un investissement de temps et d’argent pour l’avenir. Car oui, l’entreprise de demain devra évoluer pour être proactive, résiliente et alignée avec les enjeux socio-environnementaux.
De plus, c’est une économie qui porte beaucoup de sens pour les collaborateurs. C’est un défi passionnant à relever et à s’approprier qui permet d’embarquer et d’engager les collaborateurs (exemple : Décathlon).
Comment ça fonctionne ?
L’économie circulaire peut être représentée de plusieurs façons différentes :
- Les 7 piliers de l’ADEME
- Narrow – Slow – Cycle – Regenerate du Circularity Gap Report
- Les 5R (Repenser/Refuser, Réduire, Réutiliser, Recycler et Régénérer)
- Le Modèle Papillon de la Fondation Ellen MacArthur
- Le Value Hill / la colline de valeurs
Dans toutes ces illustrations, l’idée reste la même, préserver au plus la valeur possible d’un bien. Si l’on prend les deux derniers (le Modèle Papillon et le Value Hill), il s’agit de réaliser les boucles les plus petites possibles pour garder les ressources intactes.
Ainsi, de nombreuses bonnes pratiques s’intègrent dans ces modèles à 3 étapes différentes : le pré-usage, l’usage et le post-usage.
1- Le pré-usage
C’est tout ce qui concerne la première étape dans la vie d’un bien ou d’un service de sa conception à sa distribution. Dans le pré-usage, il est indispensable de travailler sur la conception. Le design des produits, le choix des matériaux… pour valoriser la future production sur le long terme.
Il s’agit de faire de l’écoconception, dont voici quelques pistes de travail :
- Des designs circulaires :
- intemporalité,
- sobriété,
- robustesse,
- multifonctionnalité,
- biomimétisme,
- dématérialisation,
- réduire (la quantité, le poids, le volume, la diversité de matière),
- supprimer ce qui n’apporte rien (exemple : les emballages superflus),
- économie de la fonctionnalité (orienté produit, utilisation ou bien performance),
- économie collaborative,
- …
Exemple : We Play Circular de Décathlon
- L’utilisation de matériaux circulaires :
- renouvelable,
- recyclé,
- biosourcée,
- choix de matériaux à faible impact,
- matériaux produit localement,
- respectueux des travailleurs et des communautés,
- matière certifiée, éthique et de sources locales,
- non-toxique,
- type de décomposition en fin de vie,
- …
Exemple : Interface
- L’allongement de la durée de vie :
- résistance,
- réparabilité,
- adaptabilité,
- évolutivité,
- …
Exemple : FairPhone
- La production :
- lieux de production,
- choix des techniques,
- limitation du gaspillage et des pertes de matières,
- sources d’énergie,
- respects des droits humains et du droit du travail,
- revalorisation des déchets ultimes,
- symbiose inter-entreprises,
- …
Exemple : Camif
- La distribution :
- lieux de vente,
- choix des transports,
- optimisation des transports,
- circularité des échanges commerciaux,
- mutualisation entre les entreprises,
- …
Exemple : Railcoop
2- L’usage
Pour l’usage, l’idée est de permettre aux consommateurs d’allonger la durée de vie de leurs produits sans avoir besoin de repasser par une étape industrielle.
- Le réemploi
Le réemploi rassemble toutes les opérations par lesquelles des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus.
Exemple : Leboncoin, Vinted ou bien les vides-greniers…
- La réutilisation
La réutilisation rassemble toutes les opérations par lesquelles des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau pour une même utilisation ou non.
Exemple : La Ressourcerie
- L’économie du partage
L’économie du partage est un nouveau mode de consommation qui permet de partager entre consommateurs l’usage ou la consommation d’un produit ou d’un service. Ce partage peut être gratuit ou payant.
Exemple : Blablacar ou AirBnB
- La réparation
Exemple : Le Repair Café
- Le vrac et la consigne
Exemple : Le Fourgon ou Mademoiselle Vrac
3- Le post-usage
Une fois que les consommateurs décident de se débarrasser de leurs produits, il est possible de les récupérer avant qu’ils ne perdent toute leur valeur. Ces pratiques nécessitent une étape d’industrialisation. Pour cela, il existe un ordre de priorité pour préserver le plus de valeur.
1. Reconditionnement
Le reconditionnement est le fait de réparer et remettre presque à neuf un produit qui a déjà été utilisé pour le commercialiser à nouveau.
Exemple : Reconomia ou BackMarket
2. Remanufacturing
Le remanufacturing est un processus industriel qui consiste à remettre à neuf un produit usagé en état de marche à un niveau de performance et de condition de garanties identiques ou supérieures à son état d’origine.
Exemple : Schneider Electric ou Lormauto (retrofit)
3. Recyclage de composant
Lorsqu’un produit est en fin de vie, il peut être démonté pour récupérer les composants en état de fonctionnement pour des opérations de maintenance, de réparation ou de reconditionnement de la même gamme de produits. Il permet aussi d’assurer les approvisionnements en composants.
Exemple : SNCF Réseau
4. Recyclage en boucle fermé
Le recyclage en boucle fermée est une forme de recyclage qui consiste à récupérer la matière pour la retransformer pour son utilisation d’origine.
Exemple : Veolia
5. Upcycling ou surcyclage
L’upcycling ou surcyclage est une forme de recyclage qui consiste à récupérer la matière pour la transformer en un produit qui a plus de valeur que le produit d’origine.
Exemple : FabBRICK ou TchaoMegot
Upcycling et réutilisation sont parfois confondus. L’upcycling nécessite la retransformation de la matière en matière première dite secondaire, ce qui n’est pas nécessaire pour la réutilisation. Cependant, la réutilisation peut aussi passer par une phase industrielle.
Exemple : La Virgule ou La Vie est Belt
6. Downcycling ou souscyclage
Le downcycling ou souscyclage est une forme de recyclage qui consiste à récupérer la matière pour la transformer en un produit qui à moins de valeur que le produit d’origine.
Exemple : Plastic Factory
7. Compostage
Le compostage est le processus de transformation de produit en matière organique vers du compost qui pourra être revalorisé grâce aux végétaux. Le compostage pour les produits est désormais réglementé par la loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire). Il est par exemple interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions “biodégradable”, ces derniers doivent être dégradés à 90 % en moins de 6 mois, etc…
Exemple : Les Alchimistes
8. Valorisation énergétique
La valorisation énergétique est le dernier outil de la valorisation de la matière. Elle consiste à utiliser le pouvoir calorifique des déchets en les brûlant et en récupérant cette énergie sous forme de chaleur ou d’électricité, ou bien via la méthanisation en séquestrant le méthane qui s’échappe lors de fermentation des matières organiques.
Exemple : Baudelet Environnement
Pour les déchets ultimes qui ne peuvent pas être évités ni revalorisés dans les boucles précédentes, ils finiront malheureusement en enfouissement. Mais cette étape revient à perdre des ressources, elle est donc à éviter par tous les moyens.
Attention
L’objectif derrière l’économie circulaire est bien de remplacer l’économie linéaire. Cependant, comme pour tout changement structurel, il existe des freins à sa mise en place.
L’un d’entre eux est la priorité des entreprises d’une croissance économique sur le court terme. En effet, mettre en place une nouvelle forme d’économie prend du temps, demande de tester, souvent d’échouer et de recommencer afin de trouver le bon format (de production, de logistique ou d’utilisation). Et ces investissements de temps et d’argents ne sont parfois pas la priorité des entreprises, même si cela est fait pour faire perdurer leur durabilité. Ce temps est important, car comme nous l’avons vu, il existe une infinité de possibilités qui ne fonctionnent pas sur tous les secteurs, ni même pour deux entreprises œuvrant sur les mêmes sujets. D’où l’importance de tester et de stimuler le droit à l’essaie, et par conséquent à échouer, afin de pouvoir réussir.
Un deuxième point de vigilance concerne les possibles conséquences de la mise en place de cette économie. L’effet rebond et les effets indirects sont deux effets aux conséquences paradoxales et perverses. Il faut donc rester vigilant.
Pour en savoir plus sur l’économie circulaire :
- Podcast : Ils ont mis le Care au cœur, épisode #2 – Benoît Gourlet, co-fondateur de La Virgule.
- Blog : Les entreprises inspirantes du mois d’avril – BLOOM, Lormauto et Leroy Merlin.
- Vidéo : Le calendrier de l’Après #16 – Le Fourgon
👉🏼 Initiez-vous à l’économie circulaire grâce à la Fresque de l’économie circulaire.